De l’art et du cochon : un livre et une expo chez IEM Paris

Un collectif emmené par le photographe Marc Martin rend un hommage au peintre Bastille. Bastille c’est cet artiste (1929-1990), figure d’une subculture gay des années 80, à l’œuvre tout...

Un collectif emmené par le photographe Marc Martin rend un hommage au peintre Bastille. Bastille c’est cet artiste (1929-1990), figure d’une subculture gay des années 80, à l’œuvre tout aussi érectile qu’un Tom Of Finland ou d’une technicité tout aussi aboutie qu’un Georges Quaintance, mais à la postérité, sans doute injustement plus confidentielle.

C’est à cette discrétion torride que répondent Marc Martin et les contributeurs à ce nouveau projet, au travers notamment la publication d’un ouvrage «Schwein, Bastille Traces».

Si l’œuvre peinte de Bastille relève du fantasme, elle n’en trouve pas moins une résonnance encore très vive aujourd’hui, il n’y a qu’à lire les propos de David Leto, ou la forte impression de Didier Lestrade quand il a interviewé le peintre en 1984. Les photos de Marc, comme à leur habitude, elles ne mentent pas. Alors bien sûr, il y a les corps, le sexe, les sexes, de la transgression au moins autant que de la transpiration, et là tu pourrais penser qu’il n’y a plus grand-chose à révéler, qu’il ne peut t’en montrer plus, aller au-delà. Mais si ces photos ne mentent pas, et c’est peut-être là, le plus excitant de l’affaire, elles sont, contrairement aux apparences, loin de tout te montrer… et alors là, tu n’as pas le choix, c’est à toi de mettre les mains, ou autre chose, dans le cambouis, à toi d’agripper les chairs et les lumières brunes et rougies, tu te demandes, et bien que tu n’en aie aucune envie, comment tu vas t’en tirer…

Ces photographies, pour cette série évocatrice de l’atmosphère lourde et saturée de l’œuvre de Bastille, elles sont comme des portes d’entrée, elles susurrent de vice-voix, elles te prennent pour mieux t’immerger en eaux troubles, tu navigues entre crasse sublime et halos brumeux, tu vas et tu viens entre latex crissant et débardeurs aux traces et relents suspects – Schwein est une odeur –, ça c’est écrit dès les premières lignes… Ces zones d’ombres incandescentes, ce flou gorgé de testostérone, ça te colle à la rétine.

Oser montrer une sexualité différente, montrer sans fards l’abandon et le partage, poétiser sans enjoliver, viriliser sans déshumaniser, hard et nonchalant, t’emmener au-delà de tes limites, mais tout en finesse, parce que finalement, il est là le tour de force, ce qui fait qu’une image de Marc ne ressemble à aucune autre, c’est ce cru subtil qui se dégage de ces évocations, cet équilibre oscillant entre interlope décadent et instinct primaire.

Parce que tu crois qu’il ne te cache rien, mais ta cervelle, ton regard, tes émois, ses images elles te baladent, parfois des jours durant, te balançant d’interrogations en d’inévitables oxymores. Tu ne peux pas passer à côté, ça te bouscule souvent, ça n’est pas toujours confortable, mais ça te donne le goût de l’interdit, de l’inédit, ça t’excite et ça t’intrigue, mais peut-être que c’est la même chose ?

Schwein, Bastille Traces

Photographies de Marc Martin

(en regard des peintures de Bastille)

Textes de Marc Martin, David Leto, Didier Lestrade, Rudi Bleys, Russell Harris, Joël Boussenot, Ad Schuring

Ed. Agua 100 pages, 25 €

Exposition « Schwein » chez IEM (16 rue Ste Croix de la Bretonnerie Paris 4) jusqu’au 4 juin.

Plus d’infos : http://www.marcmartin.paris/index.php

Culture
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